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Droits humains & culturels: enjeux de la protection de l'héritage culturel arménien du Haut-Karabagh




Nous savons que l’UNESCO est souvent en quête de consensus politique, dans le cas de la protection du patrimoine culturel arménien du Haut-Karabagh, la tâche sera difficile. Le contexte géopolitique régional, voire mondial, le sentiment anti-Arménien qui prévaut depuis longtemps en Azerbaïdjan, et la guerre ne faciliteront pas la tâche de cette organisation internationale. L’UNESCO réussira-t-elle à lier l’ordre culturel du désintéressement à la question de la paix, sans être victime des conflits d’intérêt ? La nature politique de l’UNESCO peut-elle être dépassée ? Pourra -t-elle se départir des groupes de pression ?


Ainsi, dans la continuité de ce que nous avons tenté de faire précédemment, nous voudrions préciser que la défense du patrimoine culturel arménien du Haut-Karabagh est à mettre en rapport avec les droits de l’homme et les droits culturels. Tout en restant le plus proche des textes et des conventions de l’UNESCO. Conventions qui, par le flux sémantique de droit à la culture à droits culturel comme droit des cultures à montrer une volonté de protéger les différentes identités culturelles, notamment celles des cultures minoritaires.

Si le droit à la culture et bien pris en compte dans les articles 26 et 27 de la déclaration universel des droits de l’homme de 1948, ce droit est compris comme un droit d’accès à la culture universelle, mais l’expression droit culturel reste plus indéfinie parce qu’elle n’implique pas que la culture dont il est question soit universelle. Un droit culturel peut signifier un droit de choisir une culture, un droit à sa culture ou un droit à la différence culturelle. La déclaration de 1948 ne parle pas d’un droit à la particularité culturelle. Mais le souci des droits de l’homme ne peut plus se contenter d’assurer un droit à la culture car il rencontre la question des droits culturels, de la diversité culturelle ou de la pluralité culturelle.


L’UNESCO est à l’évidence le lieu principal ou doit se développer, au plan international, la réflexion sur les droits de l’homme relatifs aux cultures. Le respect de leur diversité a été un souci majeur qui a fait adopter divers textes : La convention de 1972 sur la protection du patrimoine mondial culturel et naturel qui édite en 1989 une recommandation sur la sauvegarde des cultures traditionnelles ; en 2001 la déclaration universelle sur la diversité culturelle et en 2007, la déclaration de Téhéran sur les droits de l’homme et de la diversité culturelle. C’est donc un thème central de cette organisation internationale. Quant à la déclaration de Fribourg de 2007, relative aux droits culturels, elle confirme l’évolution du sens donné aux droits culturels, ces derniers, ne se concevant qu’en lien avec des identités. Au terme de l’article 2a le terme de « culture recouvre les valeurs, les croyances, les convictions, les langues, les savoirs et les arts, les traditions, institutions et modes de vie par lesquels une personne ou un groupe exprime son humanité et les significations qu’il donne à son développement et à son existence. »

Il s’agit clairement d’une vision anthropologique dont les arts ne constituent qu’une composante parmi d’autres.


La destruction, la haine patrimoniale, la privation de l’usage de certains édifices, la prédation le déni ou l’instrumentalisation du patrimoine arménien du Haut-Karabagh est une volonté d’anéantissement de la mémoire, qui contredirais toutes les initiatives de l’UNESCO. Protéger ce patrimoine, c’est reconnaitre le droit des cultures afin de parachever l’universalisme des droits à la culture et favoriser la diversité culturelle de la région.


Il ne s’agit pas de défendre un droit au particularisme mais de souligner la nécessité de tenir compte de l’unité singulière et du caractère de « système » d’une culture particulière. On pourra rétorquer que les droits culturels doivent être conçus indépendamment des identités culturelles afin de ne pas oublier que la culture peut- être conçue de façon autonome sans lien avec un groupe particulier. Mais le droit à la culture suppose de toute façon, la relation et le droit à la communauté au sein de laquelle on a des droits. L’identité culturelle d’un sujet n’est pas construite seulement de l’ensemble des références auxquelles la personne choisit de se référer, elle consiste aussi dans ce qu’elle a été, la culture particulière dans laquelle elle a été formée, une culture propre.


Le droit à la culture va de pair avec le droit d’y accéder à partir de la culture dans laquelle on a été formé au départ. La liberté n’est possible et n’advient que dans la condition d’une culture reçue.


La protection de l’héritage culturel arménien du Haut-Karabagh, s’inscrit, non seulement, pour ce peuple dans un « droit à » et un « droit de » mais dans la façon dont les individus existent culturellement. Il y a des conditions culturelles de l’existence sans lesquelles des individus ne peuvent plus exister en tant qu’individus, la destruction du patrimoine culturel arménien (comme toute destruction ou endommagement de patrimoine) serait néfaste pour l’exercice des droits de l’homme. Il serait une atteinte grave à la protection du patrimoine en tant que valeur fondamentale revendiquée par nos sociétés (UNESCO, Europa nostra, etc.) qui voient dans le patrimoine un « catalyseur » de l’avenir. D’autre part le respect du patrimoine culturel et sa protection doit être envisagé en tant que construction possible d’un processus de paix.

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